Le cocktail de la semaine : Le Southside des gangsters

by . | 9 mai 2018 15 h 32 min

Ah le soleil, la plage, le week-end… Un coup d’œil à gauche, votre moitié s’est encore endormie en lisant la deuxième page de son roman, bouche grande ouverte, avec ce filet de bave en coin qui fait discrètement le va et vient. La chaleur rappelle à votre cerveau qu’il est important de s’hydrater régulièrement. D’eau évidemment, mais parfois un cocktail ultra désaltérant peut venir récompenser une semaine de dur labeur, et lancer les festivités du week-end (avec modération, bien entendu…). Votre cher(e) et tendre ronfle de plus en plus fort. La gorge sèche et la honte grandissante, vous vous mettez donc en quête d’un remontant à déguster les pieds dans l’eau.

La liste de vos envies s’allonge à chaque fois que vos pieds s’enfoncent dans le sable brûlant : Mojito, Gin Tonic, Piscine de rosé, Cocktail de fruits frais, Pina Col….Stooooop ! Ne faites pas de bêtises. J’ai le cocktail idéal pour vous. Celui qui va envahir votre gosier d’une fraîcheur digne d’une boite entière de Kisscool. Dirigez-vous vers le premier barman en vue, saluez le poliment (très important ça) et demandez un Southside. Je répète : un Southside.

Un Southside n’est pas bien compliqué à réaliser (et encore moins à déguster), pourvu d’avoir un peu de menthe fraîche et du gin. Malgré tout, ce classique a sombré dans l’oublie. Très certainement la faute aux années 80, qui ont démocratisé une grande quantité de produits industriels (sirops, jus…) aux goûts artificiels et douteux. Dès lors, le bartender de base privilégia le coût et le temps gagné plutôt que la recherche du bon goût véritable. Ce n’est qu’au début des années 2000, à l’arrivée d’une nouvelle génération de barmen, que les fruits frais, sirops et liqueurs maison reviendront sur l’étalage des bars à cocktails. Mais revenons à notre Southside.

Le Southside est un cocktail datant de la Prohibition (1919-1933), période pendant laquelle les États-Unis décidèrent de bannir l’alcool du quotidien américain. Comment est-il possible qu’un grand nombre de cocktails furent crées à cette époque ? Qui dit interdiction, dit forcément contrebande. Et les plus grands gangsters ramassaient un jolie pactole grâce à la fabrication et la vente d’alcool de très mauvaise qualité. Ces derniers étaient avalés dans des bars clandestins que l’on appelait  »Speakeasy », à l’arrière boutique ou aux sous sols de boucheries, bibliothèques, salons de coiffure… Ainsi les gins étaient fabriqués  »maison », dans des baignoires. Leur goût frelaté et la haute teneur en alcool pouvait même tuer parfois. La solution pour faire passer la pilule ? Incorporer du sucre, du citron, des fruits, des plantes aromatiques, de la glace… C’est paradoxale, mais l’interdiction de consommer de l’alcool a provoqué le premier âge d’or du cocktail.

Et sinon le Southside, on y vient ? Oui, j’ai tendance à m’égarer rapidement. Mais juste avant la recette, un tout petit peu d’histoire. Les histoires du Southside sont nombreuses. Deux évoquent la création du cocktail dans des clubs de New York en 1921 (chiant). La troisième est bien plus croustillante, et illustre parfaitement les explications du paragraphe précédent. Nous sommes à Chicago, dans les années 20. Deux gangs gangrènent la ville et se livrent à une concurrence féroce sur la contrebande d’alcool. L’un des deux gangs tient le nord de la ville, et a même crée un cocktail pour consommer plus facilement ce gin un peu crado : le  »Northside », à base donc de gin et de ginger ale. Ne pouvant pas laisser passer ça, l’autre gang, dirigé par un certain… Al Capone, va vendre son gin (lui aussi un peu crado) dans le sud de la ville, et créer le  »Southside », composé de gin, sirop de sucre, jus de citron vert, menthe fraîche. Le succès est immédiat.

Sans plus attendre, la recette qui fera de vous le parfait gangster des années folles :

SOUTHSIDE COCKTAIL

60 ml de gin

20 ml de sirop de sucre

20 ml de jus de citron vert

8-10 feuilles de menthe fraîche

Type de verre : Coupe à champagne

Pas de glace

Décoration : aucune

De nos jours, les gins sont fort heureusement bien meilleurs ! N’hésitez pas à demander conseil à votre caviste : les gins peuvent avoir des dominantes sur une multitude d’épices , fruits, plantes aromatiques… L’un de mes gins préférés est espagnol, le Gin Mare : aux éléments infusés de base (baies de genièvre, coriandre, cannelle…) sont ajoutés des aromatiques méditerranéennes (basilic, romarin, thym, olives catalanes). Magnifique dans un Southside.

Faire son sirop de sucre n’est pas un luxe, mais un gage de qualité et un gain de coût. C’est très simple, il vous suffit d’une casserole, d’une quantité d’eau, et de la même quantité de sucre. Faites chauffer à feu doux, attendez que le sucre soit absorbé, et voilà !

Et enfin, jus de citron vert frais obligatoire, de même que la menthe. Oubliez au fond du placard ses bouteilles de sirops bon marché qui ne vont donneront ni le goût, ni la santé !

Le cocktail se mélange au shaker et se double-filtre dans un verre à cocktail ou une coupe à champagne. C’est à dire que l’on évite d’y placer tout élément solide dans le verre (petits morceaux de glace, morceaux de menthe…). Pour ce faire, filtrez avec un strainer et un fine strain pour les professionnels. Pour les barmen à la maison, une passoire à thé fera l’affaire !

Cheers !!

The Great Gatsby

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